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« Suisse »

La décorporation : une question de point de vue

25 août 2007, posté par Marc

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Illustration de William Blake pour un poème de Robert Blair. Image © fileane.com

C’est bien connu : lors d’expériences de mort imminente (EMI = anglais NDE = Near Death Experience), les individus sur le point de passer de vie à trépas semblent contempler un instant leur propre corps depuis l’extérieur de celui-ci. Ceux qui ont lu Les Thanatonautes de Bernard Werber (qu’on aime ou qu’on n’aime pas — là n’est pas la question) verront de quoi je parle.

Des scientifiques de l’École polytechnique fédérale de Lausanne (EPFL) et du University College London (UCL) ont mis au point une technique de décorporation artificielle qu’on aurait presque envie de tenter dans son salon (et particulièrement durant une soirée arrosée).

Les chercheurs suisses ont demandé à des volontaires de se tenir devant une caméra de sorte qu’on les filme depuis derrière. Les cobayes portaient des lunettes-écrans affichant l’image de leur dos en trois dimensions. Quand les scientifiques touchaient avec un stylo le dos des volontaires, ceux-ci voyaient face à eux, au même moment, l’image de leur propre dos et du stylo.

Les volontaires ont expliqué par la suite qu’ils avaient eu l’impression que la sensation de toucher ressentie provenait de leur dos virtuel (tel qu’affiché par les lunettes) plutôt que de leur dos réel.

Dans une autre partie de l’expérience, le dos d’un mannequin était filmé au lieu du leur ; quand le mannequin était touché, ils avaient toujours l’impression que le corps du mannequin (projeté virtuellement face à eux) était le leur.

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Schéma de l’expérience de l’EPFL © Science Journal, 2007

Plus drôle encore : les chercheurs ont éteint les lunettes de réalité virtuelle et ont demandé aux cobayes de faire quelques pas en arrière puis de revenir à leur position initiale. Les volontaires ont aussitôt tenté de revenir non pas à leur position réelle, mais à celle, présumée, de leur corps virtuel.

Selon l’EPFL et l’UCL, la décorporation des EMI aurait une explication neurologique. Les EMI provoqueraient une déconnexion entre les zones du cerveau responsables de la vision et du toucher.

Nous aurions donc le sentiment d’exister là où se trouvent nos yeux. Cela dit, quand je regarde Keanu Reeves jouer dans The Matrix, j’ai durant tout le film l’impression de… me contempler moi-même.

Merci American Academy of Arts and Sciences

Des monstres de feu et de fer

16 août 2007, posté par Marc

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Guardian. Photo © Jean-Pierre Vaufrey, 2007

Né à Morteau, dans le département du Doubs, Jean-Pierre Vaufrey vit aujourd’hui à La Chaux-de-Fonds, « la plus gothique des villes romandes » selon les dires d’un ami. Depuis une quinzaine d’années, ce sculpteur — qui cultive l’humilité — expose ses œuvres tant en Suisse qu’à l’étranger (notamment à la Maison d’Ailleurs d’Yverdon et aux Utopiales de Nantes).

Jean-Pierre a travaillé sur l’un des projets de Hans Ruedi Giger : le Garden Ghost Train, un train fantôme privé construit dans le jardin du Maître suisse de l’horreur science-fictive. Il a aussi conçu le bar d’un club de rock chaux-de-fonnier, des décors de films, des costumes de carnaval et une kyrielle se sculptures d’acier dont tous les amateurs de SF rêvent d’orner leur salon.

Bref, découvrez sans plus tarder le site Internet de ce chirurgien de l’acier, de ce magicien du chalumeau, et priez Héphaïstos qu’un jour vous puissiez contempler ses œuvres in vivo.

Merci Les Xénobiophiles

La croix et la bannière

9 août 2007, posté par Marc

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Affiche de Harrison Fisher (1875-1934). Image © The Royal Alberta Museum, 1999

En 1864, à savoir une année après sa fondation, le Comité international de la Croix-Rouge avait choisi comme emblème le drapeau suisse inversé, seul symbole reconnu à l’origine par les Conventions de Genève. En 1876, l’Empire ottoman, jugeant cette croix par trop chrétienne, créait un drapeau portant un croissant (musulman) rouge. Suivirent les versions de l’étoile-de-David rouge (qui n’est toujours pas reconnue officiellement) et le lion-et-soleil rouge (!) employé en Iran avant la chute du Shah.

Bref, la croix rouge est devenue, avec les années, indissociable de l’institution qu’elle représente : le CICR. Et pourtant, d’autres ont souhaité s’approprier ce logotype des plus efficaces. Johnson & Johnson en particulier.

Aujourd’hui, le géant étasunien, qui fait (notamment) mousser les cheveux des bambins sans leur piquer les yeux, poursuit en justice la Croix-Rouge américaine afin qu’elle cesse d’utiliser son emblème sur les objets qu’elle commercialise.

Johnson & Johnson revendique depuis plus d’un siècle les droits d’utilisation exclusifs de la croix rouge imprimée sur les bandages et les crèmes de première nécessité produits par la marque. L’entreprise pharmaceutique avance que le CICR n’est censé utilisé le symbole de la croix qu’au profit d’œuvres à but non lucratif.

Selon Mark Everson, président de la Croix-Rouge américaine, « il est obscène, de la part d’une compagnie pharmaceutique multimilliardaire, de prétendre que la Croix-Rouge a violé la loi, et ce dans le seul but, pour Johnson & Johnson, de gagner encore plus d’argent ».

Rappelons que Johnson & Johnson utilise le symbole de la croix rouge depuis 1887, c’est-à-dire six ans après la création de la Croix-Rouge américaine et vingt-quatre ans après la fondation du Comité international par des citoyens genevois.

Neuf siècles après que les premiers Croisés s’en sont allés reconquérir Jérusalem, la croix est aujourd’hui au cœur de nouvelles conquêtes — cette fois économiques. De qui se moque-t-on ? Encore heureux que Johnson & Johnson n’ait pas intenté un procès à la Confédération helvétique

Merci International Herald Tribune

Attention ! Là ! Juste derrière ton dos !

3 août 2007, posté par Stahlhelm

La main de Bienne
Photo de main (ectoplasmique ?) baladeuse prise à Bienne (sic !!), devant la gare

Au Japon, l’été est, entre autres, la saison de l’horreur. Non pas parce que le taux d’humidité avoisine mon niveau d’intolérance maximal, mais parce que les locaux adorent se raconter des histoires terrifiantes, voir des photos de fantômes et autres machins pas sains pour le cœur de musaraigne alpine (sorex alpinus) qui palpite tant bien que mal sous le fin duvet frisé de mon sein accueillant.

On dit que les frissons provoqués par ces sornettes pour lycéennes en colonie de vacances auraient des effets réfrigérants sur la large audience-éponge assoiffée de ces histoires lugubres d’hôpitaux ou d’écoles abandonnés.

Fillette
Esprit d’une fillette photographié au bord de la route

Vous me direz que cette coutume aura pour effet secondaire de réjouir M. Gore, car l’usage, autrement abusif, de l’air conditionné baisse en général de quelques % les soirées au cours desquelles la télévision japonaise passe des émissions sur ce thème champêtre. Et je vous donnerai raison, sauf qu’en ce qui me concerne, je me cache en général très lestement et tout prestement sous une épaisse couverture d’hiver pour me protéger de la venue de Sadako.

Les deux vidéos ci-dessous sont des compilations frénétiques de photos ordinaires ou d’images télévisées dans lesquelles des esprits frappeurs ou vengeurs se seraient subreptiscement glissés pour rafraîchir nos longues nuits estivales.

1ère partie

2e partie

Bon ben moi je vais me coucher et laisser mes lumières, écrans LCD divers et autres torches enduites de poix tout allumés.

Merci Japan Probe et 貞子 (Sadako).

Un podcasteur cybersquatteur

28 juillet 2007, posté par Marc

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Le siège de l’OMPI à Genève. Photo © Abraham Del Pozo

C’est bien connu : la Toile est le lieu de toutes les arnaques et, surtout, de toutes les formes de vénalités crapuleuses. Un podcasteur trentenaire — dont nous tairons le nom pour ne pas lui faire de publicité — vient de perdre face à la Twentieth Century Fox. Il usurpait le nom de domaine thesimpsonmovie.com afin d’attirer sur son site les internautes cherchant des informations sur le dernier dessin animé de David Silverman : Les Simpson (adaptation au cinéma de la série télévisée).

L’avocat du « cybersquatteur » avait proposé de vendre le nom de domaine à la Twentieth Century Fox pour 50000 dollars (plus de 36600 euros), proposition judicieusement déclinée par la Société de production étasunienne.

L’organisme en charge de l’arbitrage est la désormais célèbre Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (OMPI) basée à Genève, laquelle a réglé plus de dix mille cas de cybersquatting durant les huit dernières années.

De telles pratiques, qui fleurent bon l’attrape-nigaud, sont le fait de webmestres en manque de clics, ou encore de spéculateurs qui réservent les noms de grandes entreprises ou associations sportives en espérant faire des profits rapides.

Les mésaventures de ce podcasteur ne sont pas sans rappeler celles de Robert Alan Soloway, dit « Spam King », qui s’est fait arrêter le 30 mai dernier pour avoir envoyé, par le biais d’ordinateurs-zombies, des dizaines de millions de pourriels à travers la galaxie, et ce afin de promouvoir les services de son entreprise, le soi-disant « Partenariat stratégique contre les pourriels illégaux de Microsoft » (SPAMIS).

À force de jouer les prédateurs, ces deux messieurs se sont fait prendre dans leur propre Toile.

Merci Scotsman.com News

Tunick sur la glace

19 juillet 2007, posté par Marc

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Photo (détail) © Spencer Tunick

La photo de groupe à poil, c’est lui. Spencer Tunick, la quarantaine bedonnante, est connu comme le loup blanc, et pour cause. Il s’est spécialisé dans l’effeuillement de masse, tout d’abord avec ses concitoyens new-yorkais, puis avec d’autres Étasuniens peu frileux.

Après un bachelor en sciences obtenu à l’Emerson College de Boston, il se met à la photo. Le succès ne tarde pas à lui donner raison et il sévit alors dans les plus grandes villes de la planète : Londres, Melbourne, Montréal et São Paulo, parmi tant d’autres. Son dernier record en date : le 6 mai dernier, à Mexico, 18000 personnes ont posé pour lui. Nues.

Les 18 et 19 août prochains, à la demande de Greenpeace, Spencer Tunick remet la compresse, mais cette fois en Suisse. Et pas n’importe où : sur un glacier. Ce coup-ci, il y aura peut-être moins de monde (les bronchopneumonies et la suissitude sont ce qu’elles sont). Pour l’heure, il est encore impossible de savoir quel glacier accueillera ces messieurs dames dénudés. Le lieu de la pose dépendra des communes candidates, l’élue étant celle qui aura accepté de givrer sur son territoire les fessiers téméraires.

But de l’opération : sensibiliser l’opinion publique au réchauffement climatique. Sûr qu’entre les volontaires, la glace risque bien de fondre.

Merci les agences de presse

Payer, payer et payer encore

13 juillet 2007, posté par Marc

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Image © Fugly, 2006

La Suisse, paradis fiscal ? Certainement pas pour le consommateur lambda. Le Tribunal fédéral (TF), l’autorité judiciaire suprême de la Confédération helvétique, vient d’autoriser la Suisa (l’organe en charge de la perception des droits d’auteur) à surtaxer les lecteurs MP3. Pour ce faire, il a débouté le recours que les distributeurs de matériel électronique avaient déposé auprès de lui en début d’année.

À partir du mois de septembre, les importateurs d’iPod et autres Ersatz d’iPod devront s’acquitter de 12 à 30 francs suisses (7.30 à 18.15 euros) de surtaxe sur les baladeurs numériques. Quant à eux, les enregistreurs DVD se verront gratifiés d’une augmentation de 90 francs suisses (54.45 euros). Bien entendu, au final, ce sera au chaland de payer tout ça de sa poche (vous ne vous faisiez tout de même pas du souci pour les importateurs, non ?).

En bref, quand le citoyen Ducommun achètera un album sur l’iTunes Music Store suisse, il payera des droits d’auteurs. Quand il achètera un iPod, il payera à nouveau une taxe à la Suisa. Enfin, quand il gravera une galette pour sauvegarder son achat, il délestera encore une fois son larfeuil : en Suisse, même le vide relève de la propriété intellectuelle, les CD vierges destinés à l’enregistrement de musique (les mêmes que les autres) étant aussi sujets à des surtaxes de la Suisa.

La Suisse, Walhalla des économes ? En tout cas pas des mélomanes.

Pas merci la Suisa

Ta soeur et moi, ça te dérange ?

28 juin 2007, posté par Stahlhelm

The Maggot, alias hip hop vampire, alias dame margot fonteyne
The Maggot, alias hip hop vampire, alias dame margot fonteyne

Ça y est, je vais me lancer à bras raccourcis dans cette folle aventure qu’est le striptease mental et blogué devant vos millions de paires d’yeux incrédules. Mon esthéticienne me répétait depuis moult mois déjà qu’un jour j’aurais mes 300 mots de gloire.

Billy Web, alias tim westcountry, alias the optician, alias dvs
Billy Web, alias tim westcountry, alias the optician, alias dvs

Et elle avait raison. Un petit voyage en 1re classe avec les CFF en direction de ma patrie lacustre et voilà que je me lance, la queue entre les jambes (sic).

Je savais bien qu’un jour viendrait où une incontrôlable fièvre altruiste me tourmenterait jusqu’à ce que j’avoue ma coupable passion pour cette perle hip-hop hybride qu’est Goldie Lookin Chain, horde bestiale de pâles hérauts fumivores perdus dans les verts bois serrées du Pays de Galles.

Mystikal, alias the alchemist, alias dr. boris gobshite, alias the druid
A droite: Mystikal, alias the alchemist, alias dr. boris gobshite, alias the druid. A gauche: ?

Bon, que dire d’autre si ce n’est que GLC n’est ni fait pour les âmes sensibles, ni pour mes grands mères (c’est quand même en gallois méridional). Pour vous donner une idée concrète du concept de GLC, vous pourriez prendre une once de Beastie Boys de l’époque License to III (lll ???), l’engagement politique et la côte est en moins, y rajouter un 12 tonnes de stade anal avec les doigts, un tantinet de drogues douces et de houblon à l’hectolitre, un demi-volume du dictionnaire romand traduit en gallois et PAF ! vous aurez une crew GLC dans les dents, le goût en plus.

Mike Balls, alias hardest man in soccer violence
Mike Balls, alias hardest man in soccer violence

Bon, je suis bien d’accord : GLC n’est pas le meilleur moyen de perfectionner votre niveau d’anglais à moins que vous ne désiriez vous spécialiser dans les différentes versions de vomi parlé gallois, grosse discipline des joutes juvéniles locales. Mais bon, on ne rechignera pas à bénéficier de quelques heures de délassement mental et de délire verbal et scatologique. Je vous le jure.

P Xain, alias dwain xain zedong, alias zardoz, alias ganja bizniz, alias rhys from the band
P Xain, alias dwain xain zedong, alias zardoz, alias ganja bizniz, alias rhys from the band

Concours : LiLeLa offre un coffret anti-lycanthrope à celui qui me traduira dans son intégralité Maggot’s Stand Out (in The Manifesto, 2003). Euh, en fait non du coup.

Ô mon dieu, c’est tellement dur de mettre des photos avec de telles couleurs en étant un corbeau. A l’aide.

Terraformarsion

25 juin 2007, posté par Stahlhelm

Pelles
Photo © goooove08, 2007

Vous souvenez-vous de ces jours heureux où, armé d’une pelle de plastique fuchsia et d’une casquette Ovomaltine délavée, vous vous attachiez corps et âme à déniveler le bac à sable crotté de votre quartier ? Si tel est le cas, vous serez sans aucun doute le candidat favori pour la prochaine mission vers Mars, toujours armé de votre pelle, très probablement mécanique cette fois.

Car, en effet, selon Lowell Wood, physicien de son état et formidable lauréat version 1981 du fameux prix Ernest Orlando Lawrence, Mars fera l’objet d’une terraformation d’origine humaine d’ici la fin du XXIe siècle.

Et, toujours selon le petit Lowell à la leste pelle, l’espèce humaine serait fondamentalement terraformatrice de nature. Ouf, alors. Moi qui pensais que la transformation de Mars en un Seeland de l’espace allait être une lourde tâche, là, du coup, ça me rassure.

Merci /.

Stallman contre le vote par Internet

21 juin 2007, posté par Marc

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Richard Matthew Stallman, photo © Chrys, 2005

Richard Stallman, grand activiste du logiciel libre, était en visite lundi (18 juin) en Suisse, à l’Université de Lausanne. Rappelons que RMS (Richard Matthew Stallman) a fondé le projet GNU ainsi que la licence du même nom. Selon lui, les logiciels libres représentent un enjeu démocratique, les états devant les promouvoir. Il se bat pour les droits des utilisateurs, prônant des logiciels librement distribuables et modifiables (tel que le logiciel WordPress servant à gérer le présent blogue).

Lors de cette conférence, le programmateur à la jolie dégaine de gourou et à la bedaine de bon vivant s’est dit opposé au vote par Internet (chat échaudé craint l’eau froide : souvenons-nous des bornes de vote électroniques et de leur cafouillage pro-Bush lors des présidentielles étasuniennes de 2000). Cette pratique, déjà répandue dans quelques cantons suisses, notamment celui de Neuchâtel, est selon Stallman dangereuse par manque de trace écrite permettant de s’assurer de la bonne foi de l’opérateur en charge du vote.

La morale de l’histoire : démocratiser l’informatique, c’est aussi veiller à ce que l’informatique ne tue pas la démocratie.


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