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« bouddhisme »

Big Brothel

20 septembre 2008, posté par Marc

Steak
Photo : droits réservés

Alors que les commémorations du 11 septembre 2001 envahissaient les postes de télévision, emboîtant le pas aux ouragans Gustav et Hanna qui avaient dévasté Haïti, une nouvelle d’un tout autre genre remplissait la Toile et les journaux gratuits (arbres morts qui jonchent désormais le sol de ma ville). Une nouvelle qui aurait mérité, à bien des égards, de passer inaperçue, mais son extrême vénalité a fait sursauter plus d’un esprit rationnel.

Sous le pseudonyme de Natalie Dylan (pauvre Bob, que cette homonymie doit indisposer), une étudiante de San Diego mettait aux enchères sa virginité, espérant récolter sur eBay (qui l’a depuis déboutée) le million de dollars qui l’aiderait à obtenir un mastère de… thérapie familiale.

Quelques jours plus tard, une bimbo italienne, Raffaella Fico, qui s’était fait connaître grâce au déballage de ses charmes dans l’émission Gran Fratello (le Big Brother local), s’emparait du concept et proposait à son tour d’échanger son hymen contre force espèces sonnantes et vraiment trébuchantes.

En découvrant ces nouvelles sur mon pauvre agrégateur, lequel n’est pas encore capable de me préserver de ce genre de potins (qui fleurent bon le Kaliyuga), j’ai eu une pensée émue pour Clara Zetkin, Simone de Beauvoir, Benoîte Groult et autres icônes du féminisme qui ont lutté contre la réification de la femme et, en particulier, de son corps.

Je ne suis pas le parangon du féminisme, mais que de jeunes Occidentales, qui ne souffrent apparemment pas de malnutrition, vendent leur virginité comme s’il s’agissait d’une aiguillette de romsteck, cependant qu’en Asie du Sud-Est, de jeunes filles moins bien nées bradent la leur contre quelques billets verts, cela rajoute une couche de vernis à la patine de ma mysanthropie galopante. Cela m’a rappelé la deuxième des Nobles vérités édictées par Siddhārtha Gautama lors de son premier sermon :

Voici, ô moines, la Vérité noble dite « De l’origine de la souffrance » (Dukkhasamudāya) : c’est la soif (taṇhā) qui produit la réincarnation, qui est liée à une avidité passionnée et qui trouve une nouvelle jouissance tantôt ici, tantôt là, c’est-à-dire la soif des plaisirs des sens, la soif de l’existence et du devenir, et la soif de la non-existence.

(Dhammacakkappavattana Sutta, XI.6)

Un peu de sagesse dans ce monde de putes, ça ne peut pas nuire.

Sokushinbutsu, ou comment se momifier soi-même

31 mai 2008, posté par Corbor

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Les sokushinbutsu (即身仏) étaient des moines bouddhistes du nord du Japon qui, sous la direction des écrits de Kukai, se momifiaient eux-même afin de devenir des bouddhas dans l’outre-monde et de laisser du même coup un souvenir à leur pairs.
La pratique consistait à se nourrir exclusivement de graines et de noix pendant 1000 jours, tout en pratiquant une série d’exercices physique éprouvant. L’objectif était de se débarasser de toutes traces de graisse dans le corps. Cette première phase finie, le moine passait à un autre régime consistant d’écorces et de racines de pins. On faisait passer ça avec du thé à base de séve d’Urushi, une substance extrêmement toxique habituellement utilisée pour faire de la lacque. Le procédé rendait le corps du moine empoisonné et donc fatal à tout insectes et autres asticots qui voudraient le boulotter dans son sommeil eternel. Aprés mille autres jours de ce régime on enfermait le moine dans sa tombe avec une cloche et un tube pour qu’il puisse respirer. Chaque jour, le moine doit sonner sa cloche afin que ses disciples sachent qu’il est encore en vie. Quand la cloche arrête de sonner, la tombe est scellée. On la réouvirira 1000 jours plus tard pour vérifier que la momification a été un succés. Si oui, le moine atteint le statut de bouddha et est exposé dans le temple, si non il gagne le respect éternel des moines mais n’est pas considéré d’essence divine.
La pratique était un moyen d’éprouver le corps du moine et ainsi de démontrer son détachement total au monde physique.
Il existe 24 mommies de shokushinbutsu au japon, principalement aux alentours de Yamagata. Cette page de daruma forum offre plus de détails sur l’histoire, les raisons et les points techniques du procédé.

Toponymie brunâtre

21 août 2007, posté par Marc

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Photo © Dario Ayala, 2006

Certains lieux n’existent que par leur nom. Leur notoriété — souvent locale — provient d’un caprice de l’histoire, d’une erreur de jugement qui devient, avec le temps, une marque de fabrique. C’est le cas, par exemple, de Montcuq (en France, dans le Lot), ou encore du Milieu du Monde (surnom de la commune vaudoise de Pompaples, en Suisse).

Au Canada, dans l’Ontario, un village porte un nom aussi étrange que dérangeant : Swastika. Rappelons brièvement que swastika est un mot d’origine sanscrite (su-asti-ka, littéralement « ce qui est bon ») et qu’il désigne, aussi bien pour les hindous que pour les bouddhistes, un symbole auspicieux présent dans les lieux saints et lors des rassemblements religieux. À la réalité des Aryens d’Asie centrale s’est greffé un mythe nazi, lequel a repris à son compte la croix gammée chère au sous-continent indien.

Fondée sur l’actuelle commune de Kirkland Lake, dans le nord de l’Ontario, Swastika doit son nom à une mine d’or qui appartenait jadis à la famille Mitford. Mentionnons au passage que Unity Valkyrie Mitford (1914-1948), femme née à Londres mais conçue soi-disant à Swastika, n’a jamais caché ses sympathies pour le nazisme. Elle a notamment rencontré Hitler, Himmler, Göring et Goebbels.

Au cours de la Seconde Guerre mondiale, le gouvernement de la province de l’Ontario a souhaité changer le nom de la localité en Winston (en hommage à Churchill), mais ses habitants s’y sont opposés, prétextant que leur village portait le nom de Swastika avant que les nazis ne se l’accaparent.

En 2008, la communauté de Swastika fêtera son centenaire. Gageons que les pèlerins y seront rares et qu’ils porteront des robes safran plutôt que des chemises brunes…

Merci Andrej et Wikipedia

La réincarnation : une affaire d’état

20 août 2007, posté par Marc

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Avalokiteśvara, bodhisattva dont le Dalaï-Lama serait la quatorzième réincarnation.
Image © Dhagpo Kagyu Ling, 2004

Désormais, c’est officiel : les réincarnations de moines bouddhistes tibétains seront soumises à une autorisation des autorités chinoises. Si si. Selon l’Administration d’État pour les affaires religieuses (国家宗教事务局 = Guójiā Zōngjiào Shìwùjú), une nouvelle loi, qui prendra effet le mois prochain, définira précisément les procédures d’identification des enveloppes corporelles de ces messieurs du clergé bouddhique.

On devine bien évidemment la mainmise que la République populaire souhaite avoir sur les affaires jusque-là réglées par le Dalaï-Lama (Tala’i bLama). Après cinq décennies d’occupation chinoise, le Tibet semble essuyer une nouvelle défaite. Pourtant, le maître spirituel tibétain, qui vit en exil depuis 48 ans, a d’ores et déjà annoncé qu’il ne renaîtrait pas dans sa mère patrie tant que celle-ci serait sous la tutelle du gouvernement de Pékin.

Un souci pointe cependant déjà à l’horizon : il se pourrait bien qu’après la mort de l’actuel Dalaï-Lama, les autorités chinoises choisissent elles-mêmes un nouveau représentant du bouddhisme tibétain, et ce parallèlement à celui que les religieux en exil auront déniché.

Selon Paul Harrison, célèbre professeur de bouddhisme de l’Université de Stanford, il y a de fortes chances pour que le nouvel élu naisse parmi les 130000 Tibétains en exil de par le monde. Après tout, peu importe que son passeport ne soit pas… chinois.

Merci Newsweek

De l’impureté d’une déesse

27 juillet 2007, posté par Marc

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La kumārī Sajanī Śākya à l’âge de 6 ans. Photo © Anna Boyé, 2003

Tiens, voilà une gamine qui me rappelle fortement une nouvelle de Ian McDonald, « The Little Goddess » (que vous trouverez notamment dans The Year’s Best Science Fiction #13, 2006). Il s’agit de la déesse vivante (kumārī) Sajanī Śākya, que des prêtres népalais ont intronisée il y a de cela huit ans.

Vénérée tant par les bouddhistes que par les hindous, cet avatār de la déesse Taleju, dans sa version royale (il existe d’autres kumārī au Népal, mais celle-ci est la plus importante), est forcément issue de l’ethnie Nevār. Ce peuple, qui représente 5.5% de la population népalaise, regroupe les autochtones de la vallée de Katmandou.

Mais pourquoi vous parlé-je de tout ça ? Tout bonnement parce que la jeune fille, aujourd’hui âgée de dix ans, est rentrée il y a un peu plus d’une semaine d’un voyage aux États-Unis afin de promouvoir un film anglais retraçant sa vie. Mais cela n’a pas été sans déranger le clergé népalais. En effet, celui-ci a déclaré le 3 juillet que son petit tour en terres impies la souillait et que, selon lui, Sajanī devait être destituée à son retour.

Il y a quelques jours, les autorités religieuses du village d’origine de la kumārī sont revenues sur leur décision en annonçant que, moyennant une cérémonie purificatoire, la petite pourrait recouvrer son statut de déesse incarnée.

Cela dit, si dans quelques années, vous tombez amoureux de cette magnifique jeune fille qui rêve de devenir photographe, sachez qu’une légende prétend que tout homme épousant une kumārī est condamné à… mourir dans les six mois en crachant du sang. À bon entendeur.

Merci les agences de presse


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